Illustration : Deux guerriers francs (reconstitution contemporaine d'après les découvertes archéologiques, catalogue de l'exposition Die Franken)
[NB : on écrit le royaume des Francs, l’empire d’Orient (complément du nom), mais, par exemple, l’Empire romain ou la République française (adjectif)]
Introduction :
[présentation et justification de la date] En 511, Clovis meurt après avoir, durant un règne de 30 ans, unifié les Francs et une grande partie des anciennes Gaules romaines sous son pouvoir. Il revient alors à ses héritiers d’achever cette unification même si, paradoxalement, ils se partagent le royaume aussitôt leur père mort. [Définition des termes du sujet] Né du petit royaume de Tournai que Childéric, le père de Clovis, avait tenu au nom des derniers empereurs d’Occident, le royaume des Francs, c’est-à-dire l’espace soumis au pouvoir du roi des Francs, s’est donc dilaté aux dimensions des Gaules, exception faite du Sud-est et de la Bretagne, débordant même sur la Germanie libre. Malgré tout, il continue à se définir par un peuple, les Francs, et non par une appellation géographique. [Problématisation] On peut donc légitimement s’interroger sur ce qu’est ce royaume des Francs en 511. Est-ce une nébuleuse de peuples simplement maintenus ensembles par le pouvoir d’un roi et prête à imploser dès qu’il disparaît ? Ou bien un véritable État héritier de l’Empire romain ? Comme souvent, la réponse réside sans doute entre ces deux extrêmes. [Annonce du plan] Pour en approcher, il est nécessaire de revenir sur sa formation, sous le règne de Clovis, puis d’envisager sa situation à la mort de ce dernier, pour saisir quels germes d’avenir elle porte en elle.
[NB : plan classique pour un sujet tableau : cause – situation – conséquence, c’est encore plus vrai ici car on sait trop peu de chose sur l’année 511 elle-même pour construire tout un devoir sur ces éléments]
Plan alternatif [thématique] :
I – L’unification du royaume : conquête et rivalités internes.
II- Les Francs, les Gallo-romains et les autres : les royaumes des Francs.
III- L’administration du royaume : la royauté franque.
I- Le règne de Clovis, fondement du royaume des Francs :
A – Des débuts discrets :
De la victoire sur Syagrius au baptême : Clovis reste une force mineure et marginale dans la grande rivalité qui se joue entre Ostrogoths, Wisigoths et Burgondes sur les ruines de l’empire d’Occident.
B- L’entrée dans la lumière :
Du baptême à la conquête de l’Aquitaine :
- intervention dans le grand jeu et alliance burgonde ;
- le baptême et le ralliement des élites gallo-romaines ;
- Vouillé et la conquête de l’Aquitaine.
C- Le roi des Francs :
De Vouillé à la mort de Clovis :
- l’unification de la royauté franque (modèle = Goths et Burgondes, chez qui une seule dynastie règne) ;
- l’imitatio imperii.
- Transition sur l’Eglise qui devient un moyen de gouverner les zones conquises.
II- 511, année charnière :
A- Le concile d’Orléans et la loi salique :
Le roi des Francs, chef de l’Eglise des Gaules et « nouveau Constantin » : utilisation des structures de l’Église et de sa hiérarchie pour unifier le royaume.
La loi salique : une loi unique pour les Francs et les Romains, au contraire de ce qui se trouve chez les autres peuples germains (ex. Wisigoths : Code d’Euric = loi des Wisigoths ; Bréviaire d’Alaric = abrégé du droit romain). Elle consacre la transmission de l’héritage en ligne direct patrilinéaire (= de père en fils) en excluant les femmes de l’héritage, consacrant le projet dynastique de Clovis.
La loi salique est un pacte (pactum legis salicae), un contrat qui lie entre eux les sujets du roi des Francs quelque soit leur origine.
Elle a un caractère compensatoire : il faut payer une compensation (Wergeld) au crime commis selon son importance : ex : un main coupée : 30 sous, mais seulement 15 si elle pend encore au bout du bras.
B- La mort de Clovis et le partage du royaume :
Inhumation aux Saint-Apôtres, destinés à devenir une nécropole familiale.
Clovis avait lui-même préparé sa succession et le partage de son royaume.
Thierry Ier => roi de Cologne (fils d’une parente de Sigebert) et de Champagne. = Est du royaume.
Clotaire Ier => roi des Soissons, il hérite en fait des terres patrimoniales de Clovis et de ses premières conquêtes. = Nord du royaume
Childebert Ier => roi de Paris, avec tout l’Ouest de la Gaule. = Ouest du royaume
Clodomir Ier => le reste = Sud du royaume.
L’Aquitaine est partagée en parts égales entre les quatre frères.
Tous les quatre portent le titre de roi des Francs, les appellations « roi de X » sont une création des historiens modernes pour les distinguer.
De plus, ils héritent d’un territoire inachevé : chaque zone comporte une possibilité d’expansion et d’achèvement de la conquête de Clovis.
C- La diversité dans l’unité :
Il y a donc bien toujours un royaume des Francs qui se subdivise en quatre royaumes francs. Le partage a une certaine logique : deux fils reçoivent les terres franques, deux autres des zones récemment conquises. L’Aquitaine, dernière conquête de Clovis et province la plus riche ne constitue pas un royaume en soit, pour éviter toute velléité d’indépendance. Ces deux blocs forment donc deux ensembles réunissant autour de Thierry et Clotaire les terres de l’Est et autour de Childebert et Clodomir terres occidentales. Cette séparation Est / Ouest, terres patrimoniales franques / nouvelles terres franques devient la division fondamentale dans le royaume, et sous les règnes des fils et petits-fils de Clovis se répand l’usage des mots Neustrie (nouvelles terres) et Austrasie (Terres de l’Est).
III- L’héritage de Clovis :
A- La royauté franque, royauté patrimoniale :
- les fondements de la royauté franque : v. commentaire
- Le royaume : un patrimoine dynastique : comme tous les héritiers de grande famille, les descendant de Clovis n’ont de cesse de chercher à réunifier le RF à leur profit, y compris au pris de lutte fratricide (assassinat des enfants de Clodomir)
B- Le comte et l’évêque :
Coopération des élites franques, qui reçoivent les charges civiles dans les comtés (circonscriptions de base calquées sur les cités) et les évêques qui administrent ces cités.
C- L’achèvement de la conquête et la fusion des élites :
534-536 : conquête du royaume des Burgondes et de la Provence.
534 : le duc des Thuringiens prête serment de fidélité au roi des Francs
555 : les ducs des Alamans et des Bavarois prêtent serment de fidélité au roi des Francs.
Dès lors, les Francs contrôlent toutes les Gaules (à l’exception de la Bretagne, des Pyrénées et de la Septimanie), et toute la Germanie centrale et méridionale.
Très rapidement, dans ces terres, les élites germaniques se mêlent par le biais des mariages, si bien que rapidement, on ne parle plus que de Francs. Avec les élites gallo-romaines fières de leurs origines, la fusion est plus lente, mais déjà bien amorcée dès la fin du VIème siècle.
Mais cet achèvement de la conquête et cette fusion s’opère dans le cadre de plusieurs royaumes issus du partage de 511 et qui ne sont qu’épisodiquement réunifiés (par Clotaire I entre 561 et 565 par ex.). Cela n’empêche pas l’idée d’un royaume des Francs de survivre vis-à-vis de l’étranger et même, au sein même de ce royaume. En fait, chaque royaume est un peu comme les régions dans la France moderne : ils sont des subdivisions internes d’un espace unifié, à la seule différence qu’il n’y a pas un roi à la tête de l’ensemble.
Conclusion :
Malgré le partage de 511, malgré le maintien d’une distinction entre nouvelles terres gallo-romaines et anciennes terres franques, l’œuvre de Clovis lui a non seulement survécu, mais a été achevé par ses héritiers. L’idée d’un royaume des Francs unis gouverné par un seul roi ne disparaît jamais, et cinquante ans après sa mort, Clotaire réunifie le royaume. Quant à la collaboration des élites franques, germaniques et gallo-romaines, elle s’intensifie à un tel point qu’un siècle plus tard, il est devenu quasiment impossible de distinguer les origines de ceux qui sont tous appelés par les sources des Francs.