Illustration : plan type d'une abbaye au XIIème siècle construite selon les critères de la Règle de saint Benoît. On remarque la façon dont l'ensemble des bâtiments sont coupés du monde par une muraille, l'espace des moines étant lui-même centré sur le cloître, tandis que les visiteurs sont cantonés à proximité de la porte. L'ensemble des besoins de la communauté peuvent être remplis par les divers équipements du monastère, ce qui témoigne d'une volonté d'autarcie. Il est à remarquer que ce plan coïncide plutôt avec un monastère cistercien, qui est en général de petite taille. Les monastères bénédictins - clunisiens, plus grands et mieux équipés, étaient néanmoins construits sur un plan du même type.
Introduction :
Ordre monastique : monastique = qui se rapporte aux moines, à ceux qui ont fait le choix d’une vie solitaire (monos) consacrée à Dieu dans un cadre cénobitique (cloître = coupure par /t à l’extérieur) <> d’ermite ou anachorète.
Ordre : défini par une règle de vie commune, ce qui oppose les moines (réguliers) aux clercs séculiers (les chanoines sont donc exclus du sujet). Cette règle reste dans la majeure partie de la période la Règle de saint Benoît, rédigée par Benoît de Nursie, fondateur du Mont Cassin, au VIème siècle. Elle associe harmonieusement travail, prière et méditation de la parole divine et exige du moine quatre vœux : chasteté, obéissance, pauvreté et stabilité. Elle est commune aux bénédictins, cisterciens, chartreux et ordres militaires qui en donnent plusieurs interprétations.
Rupture au XIIIème siècle, avec de nouveaux ordres non cloîtrés, les ordres mendiants, qui adoptent la Règle de Saint Augustin, qui était jusque là en usage chez les séculiers = cas limite, car par certains aspects sont des moines (vie religieuse, chasteté, pauvreté, obéissance) mais ils vivent dans le monde. On les inclura donc dans le sujet + borne chronologique = il faut les intégrer sous peine de n’avoir rien à dire sur le XIIIème siècle.
Le sujet court donc d’une réforme (Cluny, fondé en 911) à une autre (la naissance des ordres mendiants dans les premières décennies du XIIIème siècle). => problème de la réforme, du retour à un idéal de pureté évangélique et de rupture avec le monde, sans cesse réaffirmé mais battu en brèche par les nécessaires compromis avec la société. Chaque réforme emporte l’adhésion des fidèles, car elle est en phase avec son époque (premier âge féodal pour Cluny, culture chevaleresque pour Cîteaux, essor des villes pour les mendiants) et c’est ce succès même qui conduit peu à peu à l’abandon de l’idéal et au retour dans le monde.
Problématique : étude de la tension constante entre l’idéal évangélique de la Règle et la nécessaire implication dans les affaires du monde.
I- Le siècle de Cluny (c. 950 – c. 1085).
A- Cluny et Gorze : le renouveau bénédictin.
=> réformateurs bénédictins du Xème siècle comprennent que le seul moyen pour les moines de survivre à la violence du premier âge féodal est de s’intégrer à la société seigneuriale pour collaborer avec l’élite noble et, à terme, en prendre le contrôle (accès des clunisiens à l’épiscopat et à la papauté : Hildebrandt, moine de Cluny, devient le pape Grégoire VII, 1075)
B- La vie à Cluny :
- idéal d’autarcie (v. plan) => frères lais (frères d’origine non noble ayant prononcé des vœux partiels et employés à la gestion des exploitations agricoles)
- travail = surtout intellectuel et artistiques (copie et enluminure des manuscrits), l’essentiel de la vie du moine clunisien est consacrée à la lecture d’ouvrages de piété et de théologie (on garde liste de 15 livres qui étaient remis à chaque moine de Cluny au début du carême) et à la prière liturgique (7 « heures » monastiques = prières collectives des psaumes : matines (au milieu de la nuit), laudes (matin), tierce (vers 9h), messe ou sexte (vers 12h), none (vers 15h), vêpres (vers 18h) et complies (vers 21h)). Ces horaires provoquent un décalage dans le rythme de vie du moine par rapport au reste de la société : les moines sont les seuls, au Moyen Âge, à ne pas vivre selon le rythme de l’heure solaire, ce qui exigeait un gros investissement dans l’éclairage, beaucoup de prières se faisant de nuit, et dans le perfectionnement des outils de mesure du temps (clepsydres puis horloges). Le moine ne dormait guère plus de 4 à 6 heures par nuit, ce sommeil étant coupé en deux par les mâtines. Durant le triduum pascal (jeudi, vendredi et samedi saints, qui précèdent Pâques), les moines jeûnaient et veillaient. Les repas se prenaient dans le silence complet, un frère lisant des extraits des écrits patristiques en latin. Tous ces aspects faisaient véritablement du moine clunisien un spécialiste de la prière qui chantait 4 à 5 fois le psautier complet dans l’année.
- La majorité des moines vivent au monastère dès leur enfance, car ils ont été offerts comme oblats par leurs parents. Ils ne connaissent donc aucune autre vie que celle de moine. La dot élevée exigée à l’entrée au monastère excluait de fait les roturiers du monachisme clunisien, qui recrutent surtout parmi les cadets de noblesse et la frange supérieure des patriciats urbains.
C- La puissance de Cluny :
- 1er seigneur foncier d’Europe.
- Toutes les abbayes rattachées à Cluny, à part les plus prestigieuses, deviennent des prieurés => structure féodale.
- Les expressions matérielles de la puissance : l'abbatiale Cluny III, dédicacée par le pape Urbain II en 1095 et qui fut le plus grand édifice de la Chrétienté jusqu'à la reconstruction de Saint-Pierre de Rome au XVIème siècle. Cette abbatiale accueillait une liturgie somptueuse, utilisant un riche mobilier de métaux et de tissus précieux et très théâtrale (les lectures bibliques étaient véritablement jouées par les moines pour mieux les actualiser). Illustration musicale : http://www.vip-blog.com/mp3_blog.php?pseudo=dreillard&mp3=20171.
- L’exemption : depuis 996, Cluny et toutes ses filiales, abbaye associées et prieurés, jouissent de l’exemption pleine, ce qui signifie qu’elles ne relèvent que du pape et de l’abbé de Cluny. Aucun autre pouvoir, laïc ou épiscopal, ne peut intervenir dans cette immense seigneurie qui peut rivaliser avec les plus grandes principautés. Au XIème siècle, l’abbé de Cluny est un véritable « pape bis », dont l’influence spirituelle et politique en Occident est souvent plus importante que celle du pontife romain. Son influence est majeure : les idées de paix de Dieu, de réforme de l’Eglise romaine ou de Croisades sont nées à Cluny.
- La puissance de Cluny s’accroît encore par la récupération des biens spoliés par les seigneurs laïcs et par la multiplication des donations « pro remedio animae » (pour le salut de l’âme : dons de terres et de revenus aux moines pour qu’ils prient en faveur des donateurs).
II- Les « chevaliers du Christ » : mouvements érémitiques et moines guerriers (fin XIème siècle – fin XIIème siècle).
Nés du refus des compromissions de Cluny, les nouveaux ordres exaltent tous la pureté du moine, combattant du Christ qui mène un combat spirituel contre le mal (militia Christi). Ces mouvements transfèrent donc sur le plan religieux la morale chevaleresque de l’engagement et de l’exploit, ce qui explique leur succès dans la noblesse féodale, qui leur fournit l’essentiel de leurs moines. Cet engagement pour Dieu peut prendre deux formes paradoxales :
- le retrait hors du monde et la tentation de l’érémitisme (contemptio mundi);
- l’engagement par les armes au service de Dieu.
A la croisée de ces deux mouvements se dresse les figures des fondateurs de Cîteaux et de Bernard de Clairvaux.
A- Nouvelles spiritualités et nouveaux engagements :
a- Le retrait du monde : Campanules et Chartreux : les interprétations érémitiques de la RSB.
Mais paradoxalement, participent aussi à l’expansion agricole en mettant en valeur des espaces reculés (montagnes, marécages) jusque là délaissés.
b- L’engagement dans le monde : Templiers (ordre souverain des chevaliers du Christ du Temple de Jérusalem) ; Hospitaliers (ordre souverain des chevaliers hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem) => croisades.
Mais participent aussi au mouvement d’expansion de la chrétienté occidentale en Espagne (Ordre des Chevaliers de Saint-Jacques de Compostelle) et contre les païens d’Europe de l’Est (Chevaliers teutoniques).
c- Une expérience originale : Fontevreau : abbaye fondée par Robert d’Arbrissel, un chevalier converti à la vie monastique qui organise une communauté originale, mixte, sous les ordres d’une abbesse. La tentation permanente induite par la proximité des hommes et des femmes devait rendre plus exigeante encore la chasteté des religieux et religieuses, tandis que le fait, pour les hommes, d’obéir à une femme, était une marque d’humilité extrême. Fontevreau connut un grand succès au XIIème siècle, en particulier grâce au soutien d’Aliénor d’Aquitaine et d’Henri II Plantagenêt, qui s’y firent inhumer. Transformé en ordre strictement féminin à la mort de son fondateur, Fontevreau essaima dans toute l’Europe, avant d’être absorbé par la branche féminine des cisterciennes au XIIIème siècle. Cet ordre témoigne d’une nouvelle demande spirituelle de la part des femmes dont témoigne, à la même époque, l’apparition des premières grandes mystiques, en particulier chez les bénédictines (Hildegarde de Bingen).
B- Les débuts de Cîteaux : un anti-Cluny :
- allier cénobitisme et retrait du monde : choix de lieux retirés, extrêmes rigueur de vie et humilité (les cisterciens s’habillent en laine blanche pour ne pas avoir à la teindre), monastères extrêmement simples et austères (à tel point que beaucoup d’anciens monastères cisterciens comme Clairvaux ou Loos sont aujourd’hui devenus des prisons).
- le retour à l’idéal de travail et de pauvreté (refus de la seigneurie), mais les abbayes cisterciennes sont organisées sur le modèle du lignage noble : Cîteaux est la mère, ses quatre premières filiales ses filles, les fondations suivantes des petites filles, etc… Tous les abbés se réunissent chaque année à Cîteaux au chapitre général de l’ordre que la, Charte d’Amour règle des cisterciens, compare à un conseil de famille. De même, l’abbaye conserve la distinction entre nobles (moines) et non-nobles (frères convers, qui ne prêtent que des vœux partiels et travaillent plus que les moines). La majorité écrasante des moines cisterciens sont issus de la chevalerie, ce qui a une influence sur la spiritualité cistercienne, perçue comme un combat pour la foi et contre le mal.
- la controverse avec Cluny sur la richesse de l’Eglise et le rôle liturgique des œuvres d’art, rejetés par les cisterciens => une nouvelle esthétique de la lumière (Dieu est lumière). Rôle fondamental de saint Bernard qui promeut cette nouvelle idéologie ainsi que le culte de la Vierge Marie. Illsutration musicale : http://www.vip-blog.com/mp3_blog.php?pseudo=dreillard&mp3=20172
C- Cîteaux, nouveau Cluny ?
Par son succès et sa richesse, Cîteaux pourrait être comparée à Cluny. Pourtant, même sans son succès, l’ordre reste différent, plus attaché à ses valeurs d’origine (maintien du refus des seigneuries, par exemple). La filiation symbolique entre les fondations garantie également un meilleur équilibre entre les abbayes. Les cisterciens ont toujours refusé l’exemption, et sont toujours restés soumis, au contraire, à l’évêque ordinaire (évêque du diocèse dans lequel se trouve le monastère).
L’influence cistercienne sur le monde passe surtout par un magistère d’influence : au contraire des clunisiens qui avaient adapté le monachisme au monde féodal, les cisterciens veulent transformer la société pour la rendre plus conforme au message chrétien. Bien que retirés du monde, ils acceptent de se consacrer à des tâches d’évangélisation ou de prédication, dont le plus bel exemple est donné par Bernard de Clairvaux, qui fut bien plus qu’un abbé. Á la fin du XIIème siècle, tous les papes sont des cisterciens.
Ils agissent aussi sur le monde en intégrant d’immenses espaces vierges qu’ils défrichent, drainent et mettent en culture, ce qui attire les populations => ils sont rattrapés par le monde. + progrès dans la gestion des terres avec le système des granges dépendantes de chaque monastère.
Néanmoins, à la fin du XIIème siècle, l’afflux de dons est tel que la rigueur de vie des cisterciens se relâche. Les nouveaux monastères sont beaucoup plus luxueusement décorés, les moines abandonnent la charrue aux frères convers, recréant dans leurs abbayes les inégalités de la société seigneuriale.
III- La pauvreté volontaire : un nouveau message pour un nouveau public (XIIIème siècle).
Les nouvelles formes monastiques qui apparaissent au XIIIème siècle sont issues de trois phénomènes :
- l’épuisement du monachisme traditionnel, rural, dont la richesse suscite de plus en plus de critiques ;
- les divers mouvements hérétiques (Cathares, Vaudois) issus de cette critique ;
- l’essor des villes et la nécessité d’encadrer religieusement les populations urbaines.
A- Décadence et aporie des ordres issus de la RSB :
XIIIème siècle marque le déclin des influences cisterciennes et clunisiennes, ces deux ordres faisant l’objet de critique de plus en plus généralisées contre leur richesse et l’exploitation des paysans à laquelle il se livre que ce soit à travers la seigneurie ou le salariat. Si Cîteaux garde un certain prestige dans la noblesse, Cluny traverse même une crise économique liée à l’érosion de sa rente, et qui entraîne un début de fragmentation de l’ordre (certains monastères associés ou prieurés quittent l’ordre). Deux obédiences opposées se créent entre partisans de l’ancien système, majoritaires (grande observance de Cluny) et ceux qui désireraient un retour à plus de pauvreté et de travail (observance ordinaire de Cluny). Les chapitres généraux cessent d’être tenus, comme à Cîteaux, et les fraternités (groupements locaux de monastères) commencent à prendre le pas sur l’ordre.
La perte de Jérusalem et l’échec des croisades pose la question des ordres militaires. Repliés sur Chypre puis Malte, les Hospitaliers poursuivent la lutte contre les pirates musulmans, mais les templiers, privés de leurs bases en Terre Sainte, ne font plus qu’administrer leur immense fortune, tirée de leurs butins, de leurs terres, et surtout des intérêts des prêts consentis aux chevaliers et aux rois partis se croiser. Leur richesse et leur puissance deviennent plus insolentes encore que celles des clunisiens.
Ceux qui par leur dénuement volontaire auraient pu, tels les Chartreux, présenter un exemple de vie religieuse pure aux populations s’enferment dans l’aporie de leur retrait hors du monde, perdant toute utilité sociale.
Ce sont donc d’abord les hérétiques (Cathares, Vaudois) qui présentent un message alternatif de pauvreté et d’humilité aux fidèles. Que pouvait lui opposer l’Eglise ?
B- Les dominicains : du prêche à l’inquisition.
Au début du XIIIème siècle, et malgré l’intervention des troupes de Philippe Auguste à partir de 1220, l’hérésie cathare ne cessait de gagner du terrain. La critique des richesses de l’Eglise et de son pouvoir temporel était un élément essentiel du succès de cette spiritualité hétérodoxe. Un jeune noble espagnol, Domingo Guzman de Alvaceta, étudiant à Salamanque, développa la conviction que le seul moyen de ramener les hérétiques sur le droit chemin était de prêcher la parole de Dieu par l’exemple, en menant une vie humble et pauvre et en refusant la richesse et les pompes de l’Eglise officiel. Entouré de quelques disciples, il gagna le Languedoc où, autour du couvent de Cerisy, construit de leurs propres mains, il remporta quelques succès. Officialisé par Rome en 1226, l’ordre des frères prêcheurs fut chargé de la lutte contre l’hérésie dans toute l’Europe. Mais le Saint Siège trouvait les progrès réalisés par la prédication trop lents. Lorsque l’Inquisition (tribunal ecclésiastique chargé de juger les déviances à la foi et au dogme) fut organisé dans les années 1230, les dominicains furent chargés de son fonctionnement. La torture et le bûcher remplacèrent bientôt la parole, et le prêcheur Bernardo Guy rédigea même, vers 1250, un manuel de l’inquisiteur qui détaillait les différentes hérésies et les moyens d’obtenir, par la persuasion ou la force, les aveux des hérétiques.
Recrutant surtout des universitaires issus de la petite noblesse et de la bourgeoisie, l’ordre dominicain donna aussi de grands penseurs tels que Thomas d’Aquin ou Albert le Grand.
L’ordre dominicain ne relevait que du pape, particularité qu’il partageait avec l’ordre franciscain.
C- Les franciscains : l’exemplarité de la pauvreté.
François d’Assise était le fils d’un marchand exemplaire de l’essor des bourgeoisies urbaines à la fin du XIIème siècle. Il vit une jeunesse dorée avant d’être frappé par l’expérience de la guerre. Vers 1205, il renonce à son héritage pour aller vivre parmi les plus pauvres, qu’il impressionne par son mysticisme. Il rassemble bientôt un premier groupe de disciples qui sont d’abord soupçonnés par Rome d’être hérétiques car ils critiquent la richesse de l’Église (v. le Nom de la Rose). Finalement intégrés à l’Église en structurés en ordre suivant la règle de saint Augustin, ils forment les Frères mineurs, religieux qui refusent toute donation et ne vivent que des aumônes des fidèles. Ils sont utilisés dans l’instruction religieuse et l’encadrement des masses de salariés pauvres urbains, au point d’inquiéter les séculiers par leur influence grandissante (ils attiraient en particulier les pauvres car ils n’exigeaient pas le paiement de droits pour célébrer les baptêmes et enterrements comme c’était la coutume dans les églises paroissiales). Surtout issus de la petite et moyenne bourgeoisie urbaine, mais aussi ouvert aux plus pauvres, l’ordre franciscain a un recrutement plus divers que les ordres des siècles précédents. Il est aussi le premier dont la branche féminine, les Clarisses, fut créée presque simultanément, par une amie de François, Claire. Gagnant en influence, les franciscains entrent dans les cercles du pouvoir : l’un d’eux fut le confesseur de Louis IX. Les papes de la fin du XIIIème siècle sont tous issus de l’ordre franciscain. Ce succès les conduisit à se couper de leur humilité originelle. Ils commencèrent à accepter les donations, dîmes et autres droits ecclésiastiques. A partir de la fin du siècle, le franciscain gourmand et libidineux qui abuse de son statut religieux pour dérober de la nourriture et abuser des femmes devient un personnage récurent des fabliaux et des farces.
Conclusion :
De réforme en réforme, le monachisme du Moyen Âge central n’a cessé de chercher à incarner la pureté évangélique dans un monde souvent violent et qu’il cherchait à christianiser par ses prières, mais souvent aussi par son action sur la société. D’abord intimement mêlé au monde féodal, dont étaient issus les moines, presque tous d’origine noble, il s’intégra grâce aux Mendiants à l’essor urbain du XIIIème siècle. Car le paradoxe de ces réformes étaient que le retour à la pureté d’une vie hors du monde avait d’abord pour but d’agir sur ce monde pour le rendre plus profondément chrétien. Le succès même de ses réformes, en accroissant l’influence et la richesse de chaque ordre, a conduit finalement à leur échec, car ils restaient prisonniers d’une structure sociale qui persistaient à les considérer comme des spécialistes de la prière dont l’intercession devait être rémunérée par des dons. Il faut attendre une autre Réforme, plus radicale, au XVIème siècle, pour que naissent de nouvelles formes de religiosité remettant définitivement en cause cette structure. Néanmoins, le fait que tous ces ordres existent encore aujourd'hui montre qu'ils ont sur créer des formes de spiritualité propres qui sont restées porteuses d'un message d'humilité et de retrait de monde à travers les siècles.